Avec la montagne, la grande passion d'Henry Russell fut la musique qui se pratiquait alors dans le cadre de la vie mondaine : "Des mille plaisirs que j'ai goûtés dans les salons, celui qui m'a toujours le plus charmé, ravi, enthousiasmé, c'est la musique. Elle me faisait tout oublier. La poésie mystique et passionnée des sons est certainement ce que les hommes ont inventé de plus divin. Elle me transporte au septième ciel.... "
Dans sa jeunesse Henry Russell fut un brillant danseur, avec son jeune frère Ferdinand ils fréquentait assidument les bals, jouaient dans des pièces de théâtre. S'il faut en croire plusieurs témoignages de l'époque, les jeunes femmes recherchaient avec assiduité les deux jeunes et émérites danseurs.
Cette passion pour la musique ne date pas de la fin de la vie d’Henry Russell comme on le croit généralement, c'est une constante qu'il exprima à toutes les étapes de son existence. Au retour de son grand voyage autour du monde, le 9 mars 1864, il participait déjà au concert de charité donné au profit de l'œuvre de la Providence, dans la salle des concerts du Théâtre de Pau. Ses talents de violoncelliste lui permettaient parfois de soutenir la cause irlandaise qu'il n'oublia jamais ; en 1880, H. Russell confie à Roger de Bouillé que le 1er mars, il a joué devant plus de 400 personnes, dans un grand concert au bénéfice des Irlandais.
A Pau, il pratiquait avec assiduité le violoncelle qu'il avait étudié sous la direction de Louis Heller, violoniste d'origine allemande installé à Pau pour des raisons de santé. De février à Pâques, il réunissait des amis à son domicile pour jouer de la musique ; il jouait aussi dans les salons, notamment dans des trios avec au piano, Léandre Czerniewski l'organiste de l'église Saint-Martin et au violon, Louis Alonso. Dans ses courriers, il rend abondamment compte de ses activités musicales. La musique revient aussi comme base de comparaison ou d'allégorie dès qu'il s'agit d'évoquer son autre passion, celle des Pyrénées : "L'Inconnu [dans les Pyrénées] a presque entièrement disparu : mais que de variations à faire sur le "connu" ! Est-ce que Mozart et Beethoven n'ont pas écrit des variations divines sur des thèmes épuisés ? ".
En 1905, alors qu'il a arrêté les ascensions, H. Russell fait plus que jamais de la musique, ainsi qu'il le confie à Henri Beraldi : "Jamais depuis une quarantaine d'années je n'avais fait tant de musique que cet hiver, tantôt avec des artistes de premier ordre (et alors en trio), tantôt avec des amateurs, entre autres avec une charmante jeune fille Française, qui m'accompagne en vraie virtuose, même du Piatti et du Servais. Et c'est ainsi que cet art "divin" par excellence m'a fait oublier les horreurs d'un hiver presque toujours plus froid qu'à Paris ! et qui n'est pas encore fini ! "
Parmi les pièces exclusives présentées dans ce chapitre, signalons tout particulièrement le violoncelle d’Henry Russell, authentifié à son époque – parmi les nombreux violoncelles appartenant à sa famille- par son unique neveu, Maurice Russell, et aussi de précieuses lettres adressées au grand musicien Francis Planté, prêtées par la Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne, propriétaire du riche fonds Francis Planté.